Un danger grave et imminent pour la vie ou la santé

lundi 08 avril 2024

Cass. soc., n° 22-20.649 du 27 mars 2024 - Le droit de retrait est justifié en présence d'un motif raisonnable permettant de penser que la situation présente un danger grave et imminent pour la vie ou la santé et ce indépendamment de l'existence d'un tel danger

Conformément à l’article L. 4131-3 du Code du travail, aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un travailleur ou d'un groupe de travailleurs qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d'eux.

Dès lors, pour se prononcer sur la validité d’un tel droit de retrait, il appartient aux juges de rechercher si le salarié avait effectivement un motif raisonnable de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé, et ce, indépendamment de l'existence ou non d'un tel danger, justifiant l'exercice du droit de retrait.

Telle est la solution rappelée par la Cour de cassation dans un arrêt du 27 mars 2024.

***

En l’espèce, un steward d’une compagnie aérienne, programmé sur un vol vers Israël le 19 juillet 2014 a fait valoir, lors du briefing de vol, qu’il exerçait son droit de retrait.

Il a saisi le juge des référés pour contester la retenue de salaire à laquelle avait procédé son employeur avant que ce dernier ne restitue la somme litigieuse. Il a ensuite saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts pour préjudice moral.

La Cour d’appel rejette sa demande.

Les juges relèvent que le 8 juillet 2014, le cessez-feu entre Israël et la Palestine a été rompu. Le lendemain, le CHSCT a déposé un droit d'alerte en raison du danger grave et imminent existant sur les vols vers ces destinations du fait d'intenses tirs de roquette, notamment depuis la bande de Gaza et l'employeur a suspendu la prise des repos en escale par les équipages. Cependant, le 19 juillet 2014, date à laquelle le salarié a exercé son droit de retrait, aucune compagnie aérienne n'avait suspendu ses vols vers ces destinations.

Or, la décision de desservir ou non une escale est prise au plus haut niveau de la direction de l'entreprise en concertation avec son département Sûreté, lui-même en relation étroite avec le Ministère des affaires étrangères dont la mission est de surveiller, analyser et informer sur tous les événements touchant à la sûreté du transport et de vérifier si les vols présentent ou non un danger, notamment pour les membres de l'équipage. Ces informations ont d’ailleurs conduit la société à suspendre ses vols vers ces destinations à partir du 22 juillet 2014.

Toutefois, au regard de l'ensemble des précautions prises par l'employeur à partir des informations précises, complètes et actualisées concernant la sécurité des dessertes aériennes, mises à sa disposition, le salarié ne pouvait légitimement se prévaloir à la date du 19 juillet 2014 d'une situation présentant un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé ; de sorte que son droit de retrait n’était pas justifié selon les juges du fond.

La Cour de cassation censure cette position en rappelant qu’il appartenait aux juges du fond de rechercher si le salarié avait un motif raisonnable de penser, à la date du 19 juillet 2014, que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé, et ce indépendamment de l'existence d'un tel danger, justifiant l'exercice du droit de retrait.

***

Pour rappel :

Les Hautes juridictions ont déjà précisé à plusieurs reprises les conditions de validité d’un droit de retrait légitime :

***

Voir aussi :

Consulter sur KALIPSO – Droit-Santé-Travail une Question / Réponse sur le droit de retrait de plusieurs conducteurs de bus à la suite de l’agression d’un collègue.

***

Retrouver le texte officiel sur le site de la Cour de cassation

***************************

Récapitulatif des mises en ligne sur KALIPSO du 25/03/2024 au 05/04/2024

QUESTION / REPONSE

# DUERP : quelles modalités de mises à jour et de conservation ?

JURISPRUDENCE