Changement d'horaires et impératif tiré de la vie personnelle

lundi 10 juin 2024

Cass. soc., n° 22-21.814 du 29 mai 2024
Modification d'un horaire de nuit à jour : le salarié peut valablement refuser un changement d'horaires s'il justifie d'un impératif tiré de sa vie personnelle et familiale

Par un arrêt publié le 29 mai 2024, la Cour de cassation fait primer le droit du salarié à une vie personnelle et familiale sur les prérogatives de l'employeur en matière d'organisation du travail, dès lors que le salarié apporte les justificatifs nécessaires.

Ainsi, le refus d’un salarié de changer d'horaires de travail (travail nuit / travail jour) ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, dès lors qu’il est avéré que ce changement d’horaires non seulement porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie personnelle et familiale mais aussi est incompatible avec ses obligations familiales impérieuses afin de s'occuper d'un enfant handicapé.

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Dans cette espèce, un salarié, agent des services de sécurité incendie, a vu son contrat de travail transféré à une entreprise privée, attributaire d'un marché de prestations de sécurité situé sur un autre site avec un passage en horaire de jour au lieu d’un travail de nuit.

L’intéressé, qui invoquait la nécessité d'une présence diurne auprès de son enfant handicapé, avait refusé 3 affectations pour un service de jour.

Licencié pour faute grave, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

De son côté, l’employeur faisait état des dispositions conventionnelles selon lesquelles les salariés de cette branche assurent un service indistinctement de jour ou de nuit ; de sorte qu’il s’agit là d’une modalité normale de l'exercice de leurs fonctions. En outre, d’après l’employeur, les contraintes personnelles du salarié ne lui sont pas opposables.

Mais, la Cour de cassation valide la Cour d’appel d’avoir déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié aux motifs que le passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour portait une atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale et était incompatible avec les obligations familiales impérieuses.

En effet, le salarié produisait la notification du versement de l'allocation d'éducation spécialisée pour sa fille âgée de 7 ans et handicapée à 80 % pour laquelle la MDPH avait reconnu la prise en charge par les parents d'au moins 20 % des activités de l'enfant par une adaptation des horaires de travail.

Dès lors, l’intéressé justifiait bien d'un motif lié au respect de la vie personnelle et familiale nécessitant un maintien de ses horaires de nuit. Or, l'entreprise ne justifiait pas de ce qu'elle ne disposait pas de poste de nuit.

Par conséquent, refus du salarié ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.

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Retrouver le texte officiel sur le site de la Cour de cassation

Voir aussi :

Cass. soc., n° 18-18.039 et n° 18-18.040 du 16 septembre 2020
Prise d'acte de la rupture du contrat de travail en raison de la modification des horaires de travail d'un couple ambulanciers

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Récapitulatif des mises en ligne sur KALIPSO du 27 mai au 9 juin 2024

QUESTION / REPONSE

# Passeport de prévention : quelle effectivité aujourd’hui

LÉGISLATION & RÉGLEMENTATION

· Décret n° 2024-468 du 24 mai 2024 relatif à la mise en œuvre de l'espace numérique de santé


 

JURISPRUDENCE

  • Cass. soc., n° 22-21.814 du 29 mai 2024
    Modification d'un horaire de nuit à jour : le salarié peut valablement refuser un changement d'horaires s'il justifie d'un impératif tiré de sa vie personnelle et familiale
  • Cass. 2ème civ., n° 22-14.402 du 16 mai 2024
    Indemnités journalières au titre d'un arrêt de travail et exercice d'une activité physique : précision sur le moment où l'autorisation doit être donnée par le médecin prescripteur
  • Cass. soc., n° 22-19.849 du 22 mai 2024
    En l'absence de décision judiciaire, le droit de retrait exercé par un salarié de manière infondée permet à l'employeur d'opérer une retenue sur salaire