Obligation de rechercher des solutions de reclassement

lundi 24 juin 2024

Cass. soc., n° 23-13.522 du 12 juin 2024 - La mention expresse dans un avis médical d'inaptitude exonère bien l'employeur de son obligation de rechercher des solutions de reclassement – Jurisprudence confirmée

 

« Lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis d'inaptitude que ’’Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’’ ou que ’’L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi’’, alors l'employeur n'est pas tenu de rechercher un reclassement ».

Les précisions apportées par le médecin du travail, postérieurement au constat régulier de l'inaptitude, sur les éventuelles possibilités de reclassement concourent à la justification par l'employeur de l'impossibilité de remplir cette obligation.

Telle est la solution confirmée par la Cour de cassation, dans un arrêt publié le 12 juin 2024.

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Dans cette affaire, un salarié, ouvrier spécialisé, est, à l’issue d'une visite de reprise faisant suite à un arrêt de travail consécutif à une maladie non professionnelle déclaré inapte à son poste.

Le médecin du travail a émis l'avis suivant :

« Inaptitude définitive au poste de travail du fait des contraintes posturales et manipulations suite à étude du poste et des conditions de travail. L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi ».

Après ce constat définitif de l’inaptitude, le médecin a informé, par courriel, l’employeur de ce qu'il avait statué, en ce qui concerne ce salarié, par une inaptitude définitive à son poste de nettoyage avec impossibilité de reclassement dans l'emploi en précisant ceci :

« En conséquence, cette décision vous relève de l'obligation de recherche de reclassement professionnel suite à inaptitude et, sauf élément contraire, (le salarié) devrait faire l'objet d'un licenciement ».

Licencié pour inaptitude, le salarié saisit la juridiction prud’homale.

La Cour d’appel déclare le licenciement sans cause réelle et sérieuse, dans la mesure où l'avis du médecin du travail émis ne mentionne l'impossibilité de reclassement que dans l'emploi et non dans tout emploi. D’après les juges du fond, la mention de l'emploi, qui tend à viser l'emploi occupé précédemment, ne peut être assimilée à celle d'un emploi qui suggère la référence à une généralité d'emplois, de sorte qu'un salarié peut, en effet, être inapte à un type d'emploi sans l'être nécessairement à tout emploi sauf indication en ce sens du médecin du travail, inexistante en l'espèce.

Or, en l’espèce, l'employeur n'a procédé à aucune recherche de reclassement au sein de l’entreprise, alors que l'avis du médecin du travail n'était pas de nature à l'exonérer de son obligation à cet égard.

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel aux motifs l'avis d'inaptitude du médecin du travail mentionnait expressément que « l'état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans l'emploi » ; dès lors l'employeur était bien dispensé de rechercher et de proposer au salarié des postes de reclassement.

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Retrouver le texte officiel sur le site de la Cour de cassation

 

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Récapitulatif des mises en ligne sur KALIPSO du 10 juin au 21 juin 2024

QUESTION / RÉPONSE

  • Passeport de prévention Vs. Compte personnel de formation : quel(s) lien(s) entre ces deux outils ?

 

LEGISLATION & REGLEMENTATION

· Décret n° 2024-552 du 17 juin 2024 relatif à la prévention du risque électrique lié aux travaux d'ordre non électrique réalisés dans l'environnement d'ouvrages ou installations électriques aériens ou souterrains

· Arrêté du 4 juin 2024 modifiant l'arrêté du 14 août 2012 relatif aux conditions de mesurage des niveaux d'empoussièrement, aux conditions de contrôle du respect de la valeur limite d'exposition professionnelle aux fibres d'amiante et aux conditions d'accréditation des organismes procédant à ces mesurages

· Arrêté du 15 mai 2024 relatif à la démarche de prévention du risque radon et à la mise en place d'une zone radon et des vérifications associées dans le cadre du dispositif renforcé pour la protection des travailleurs


JURISPRUDENCE

· Cass. 2ème civ., n° 21-23.216 du 6 juin 2024 Un apprenti victime d'un AT dans le cadre de sa formation ne peut agir contre son CFA pour obtenir réparation de ses dommages selon le droit commun

· Cass. soc., n° 23-14.292 du 12 juin 2024 Des agissements sexistes commis par un salarié peuvent justifier son licenciement pour faute grave

· Cass. soc., n° 23-11.695 du 12 juin 2024 Avant le 31 mars 2022 : pas de calcul per capita pour la cotisation due à un S(P)ST mais bien par « salarié ETP » - Confirmation jurisprudentielle

· Cass. 2ème civ., n° 22-13.692 du 16 mai 2024 Compétence des juridictions françaises dans le cadre d'une faute inexcusable d'un employeur monégasque suite à l'AT mortel d'un salarié français sur le territoire français

· Cass. soc., n° 22-20.963 du 12 juin 2024 La réforme d'un agent de la RATP ne peut intervenir qu'après avis d'inaptitude définitif à tout emploi prononcé par la commission médicale

· Cass. soc., n° 23-13.522 du 12 juin 2024 La mention expresse dans un avis médical d'inaptitude exonère bien l'employeur de son obligation de rechercher des solutions de reclassement – Jurisprudence confirmée

· Cass. soc., n° 23-13.975 du 12 juin 2024 S'il a pris toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité du salarié, alors l'employeur ne manque pas à son obligation de sécurité

· Cass. soc., n° 22-23.533 du 29 mai 2024 Licenciement pour insuffisance professionnelle à la suite d'une série de réaffectations successives et infructueuses consécutivement à une situation de harcèlement moral

· Cass. soc., n° 23-13.775 du 29 mai 2024 Exemple jurisprudentiel dans lequel les juges, conformément aux règles spécifiques, apprécient l'absence de tout harcèlement moral

· Cass. soc., n° 23-12.856 du 29 mai 2024 Secret médical Vs. Droit de la défense : la production de pièces médicales doit être indispensable et proportionnée au but poursuivi – Jurisprudence confirmée

· Cass. soc., n° 22-18.328 du 29 mai 2024 Manquement du salarié à son obligation de sécurité : sa faute s'apprécie compte tenu de son passif disciplinaire et de l'obligation de sécurité de l'employeur

· Cass. soc., n° 22-18.947 du 29 mai 2024 Souffrance au travail et RPS : manquement de l'employeur à son obligation contractuelle de bonne foi quand un salarié subit des conditions de travail détériorées

· Cass. soc., n° 22-13.440 du 29 mai 2024 Licenciement pour faute grave d'un salarié en arrêt « AT » : seul un manquement à l'obligation de loyauté peut être reproché