Alcootest et faute grave
mardi 01 octobre 2024
Cass. soc., n° 22-19.116 du 11 septembre 2024
Un retard au poste et un alcootest positif ne caractérisent pas nécessairement une faute grave
Dans cet arrêt du 11 septembre 2024, la Cour de cassation considère qu’au regard de l’ancienneté du salarié, n’ayant aucun antécédent disciplinaire, un retard au poste de travail et un alcootest positif ne constituent pas nécessairement une faute grave.
En effet, si la consommation d’alcool nécessite une éviction du poste de travail, pour autant celle-ci ne rend pas nécessairement impossible la poursuite du contrat de travail.
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En l’espèce, un salarié engagé en qualité de manutentionnaire, puis affecté à un poste de nuit de second sur encarteuse, a été mis pied à titre conservatoire puis licencié pour faute grave. Son l’employeur lui reprochait un retard de plus deux heures sur son poste de travail après qu’il ait consommé de l’alcool, cette consommation ayant été révélée par un alcootest réalisé, conformément aux dispositions du règlement intérieur.
La Cour de cassation, confirmant l’arrêt d’appel, considèrent que les faits reprochés ne rendaient pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et ne constituaient donc pas une faute grave.
En effet, si l’état d'ébriété du salarié était avéré et rendait nécessaire son éviction de l'atelier, il s'agissait cependant d'un fait isolé, le salarié n'ayant aucun antécédent disciplinaire en plus de 10 ans dans l’entreprise.
Ainsi, si les faits reprochés pouvaient justifier un licenciement, ceux-ci ne pouvaient toutefois pas être qualifiés de faute grave.
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Pour rappel :
S’il appartient bien à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail) ; le salarié est également lui-même débiteur d’une obligation de sécurité (article L. 4122-1 du Code du travail ; Cass. soc., n° 20-16.228 du 8 décembre 2021).
Ainsi, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail.
Le manquement d’un salarié à son obligation de sécurité peut justifier une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.
L’appréciation de cette faute grave se fait au cas par cas.
S’agissant de la consommation d’alcool, la Cour de cassation a déjà validé un licenciement pour faute grave suite à un état d'ébriété au travail attesté par un alcootest (Cass. soc., n° 20-18.354 du 26 janvier 2022) alors que dans l’arrêt commenté ci-dessus du 11 septembre 2024, la faute grave a été rejetée.
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Récapitulatif des mises en ligne sur KALIPSO du 16 au 27 septembre 2024
QUESTION / REPONSE
JURISPRUDENCE
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- Un harcèlement moral avéré peut justifier une résiliation judiciaire du contrat lorsqu'il empêche sa poursuite