Médecins exerçant dans les unités sanitaires en milieu pénitentiaire

lundi 08 décembre 2025

CE., n° 49/7673 du 7 novembre 2025
Les médecins exerçant dans les unités sanitaires en milieu pénitentiaire sont compétents pour assurer, en partie, le suivi individuel de l'état de santé des personnes détenues ayant une activité de travail

Le décret n° 2024-773 du 8 juillet 2024 relatif à la médecine du travail en détention, établit les modalités du suivi individuel de l'état de santé des personnes détenues qui travaillent, assuré par les médecins des unités sanitaires en milieu pénitentiaire, de même que celles du suivi individuel renforcé de l'état de santé des personnes détenues qui travaillent, assuré par les médecins des SPST.

Dans cet arrêt du 7 novembre 2025, le Conseil d’Etat vient valider les dispositions de ce décret.

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En l’espèce, le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) et l’association des professionnels de santé exerçant en prison demande l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 8 juillet 2024 précité. Ils motivent leur demande par l’absence de compétence suffisante des médecins exerçant dans les unités sanitaires en milieu pénitentiaire pour assurer le suivi individuel de l'état de santé des personnes détenues exerçant une activité de travail. Ils ajoutent que cette absence de compétence serait de nature à violer l’obligation d'assurer la santé et la sécurité des personnes détenues dans des conditions équivalentes à celles dont bénéficie l'ensemble de la population (article L. 322-1 du Code pénitentiaire), ainsi que l'interdiction faite aux médecins d'entreprendre ou poursuivre des soins ou de formuler des prescriptions dans des domaines qui dépassent leurs connaissances, leur expérience et les moyens dont ils disposent (article R. 4127-70 du Code de la santé publique).

Le Conseil d’Etat rejette leur demande en ce que, notamment, le décret attaqué limite le champ de compétence des médecins exerçant dans les unités sanitaires en milieu pénitentiaire au suivi individuel de l'état de santé des personnes détenues exerçant une activité de travail, à l'exclusion des personnes détenues dont l'activité de travail présente des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité ou celle de toute autre personne évoluant dans l'environnement immédiat de travail, qui font l'objet d'un suivi individuel renforcé par le médecin du travail. En outre, aucune disposition du décret attaqué n'a pour objet ou pour effet de les habiliter à proposer des mesures individuelles d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d'aménagement du temps de travail, ni à prononcer des avis d'aptitude ou d'inaptitude, ces prérogatives demeurant de la seule compétence du médecin du travail.

Dans ces conditions, le manque de compétence de ces médecins n’ayant pas suivi la spécialisation « médecine du travail » dans le cadre du troisième cycle des études médicales n’est pas recevable.

Par ailleurs, les médecins exerçant dans les unités sanitaires en milieu pénitentiaire disposent d'une formation d'au moins 65 heures théoriques en santé au travail permettant notamment d'acquérir des compétences en matière de risques et pathologies professionnels et des moyens de les prévenir ainsi que de suivi individuel de l'état de santé des personnes détenues exerçant une activité de travail et des examens médicaux associés.

Par ailleurs, les médecins disposent de la liste des emplois les plus susceptibles d'être occupés dans l'établissement pénitentiaire et exercent leurs missions en collaboration avec un service de prévention et de santé au travail, en vertu d'une convention tripartite conclue entre l'établissement pénitentiaire, l'unité sanitaire en milieu pénitentiaire et le service de prévention et de santé au travail interentreprises géographiquement compétent (article R. 412-127 du Code pénitentiaire).

Ainsi, l'obligation d'assurer la santé et la sécurité des personnes détenues dans des conditions équivalentes à celles dont bénéficie l'ensemble de la population est bien respectée.

Enfin, les médecins exerçant dans les unités sanitaires en milieu pénitentiaire auxquels le décret attaqué confie le suivi individuel de l'état de santé des personnes détenues exerçant une activité de travail n'étant pas des médecins du travail, le moyen tiré de ce que le décret attaqué ferait obstacle à ce que les personnes détenues bénéficient des droits qui leur sont ouverts par le IV de l'article L. 1111-17 du code de la santé publique est inopérant (consentement exprès et information préalable de la personne quant aux possibilités de restreindre l'accès au contenu de son dossier).

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Retrouver le texte officiel sur Légifrance


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