Manquement de l'employeur à son obligation de sécurité
lundi 13 mai 2024
Cass. soc., n° 22-19.401 du 24 avril 2024 - Lorsqu'un salarié conteste son licenciement pour inaptitude dans le délai imparti, il peut alors invoquer le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité à l'origine de son inaptitude peu important la date de ce manquement
Dans cet arrêt publié du 24 avril 2024, la Cour de cassation rappelle que le point de départ du délai de prescription de l'action en contestation du licenciement pour inaptitude d'un salarié est la date de notification de ce licenciement.
Dès lors, lorsqu'un salarié conteste, dans le délai imparti, son licenciement pour inaptitude, il est recevable à invoquer le fait que l'inaptitude est la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et ce peu important la date de ces manquements qui peuvent même être prescrits à la date de la contestation.
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En l’espèce, une salariée engagée en qualité de « merchandiser » le 22 août 2011, a été en arrêt de travail à compter du 20 février 2013 avant d’être déclarée inapte à son poste à l'issue de deux visites de reprise des 18 septembre et 5 octobre 2015.
Elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 23 décembre 2015 et a saisi la juridiction prud'homale le 18 mai 2016. La salariée contestait le bien fondé de son licenciement en invoquant un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
La Cour d’appel rejette la demande de la salariée en considérant que son action était prescrite. En effet, les juges du fond considèrent que la salariée avait nécessairement connaissance des manquements à l'obligation de sécurité à la date de son arrêt de travail, le 20 février 2013, de sorte que son action à ce titre était prescrite depuis le 20 février 2015 (conformément au délai de prescription de 2 ans qui s’appliquait au moment des faits, voir le « pour rappel » pour plus de précisions).
Si la Cour de cassation valide le fait que la salariée avait connaissance à la date de son arrêt de travail, soit le 20 février 2013, des manquements à l'obligation de sécurité de l'employeur qu'elle invoquait, elle censure toutefois l’arrêt d’appel s’agissant de la prescription de son action en contestation de son licenciement sur ce fondement.
La Haute Cour affirme que lorsqu'un salarié conteste, dans le délai imparti, son licenciement pour inaptitude, il est recevable à invoquer le fait que l'inaptitude est la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité peu important le fait que les faits constitutifs de ce manquement soient eux prescrits. Par ailleurs, le délai imparti pour contester un licenciement commence à courir à compter de sa notification.
Dans cette affaire, la salariée avait été licenciée le 23 décembre 2015 de sorte qu’en saisissant le Conseil de prud’hommes pour contester son licenciement le 18 mai 2016, elle respectait le délai pour agir (qui était de 2 ans à l’époque des faits) et pouvait donc dans ce cadre invoquer le manquement de son employeur à son obligation de sécurité peu important la date de ces manquements.
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Pour rappel :
Dans cette affaire, c’était l'article L. 1471-1 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 14 juin 2013 qui s’appliquait. A l’époque, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrivait par 2 ans à compter de la connaissance des faits.
Depuis l’Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, reprise dans la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances, l'action en justice relative à toute rupture d'un contrat de travail doit être engagée dans les 12 mois suivant la notification de la rupture (article L. 1471-1 du Code du travail).
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Retrouver le texte officiel sur le site de la Cour de cassation
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Récapitulatif des mises en ligne sur KALIPSO du 22 avril au 7 mai 2024
QUESTION / RÉPONSE
LEGISLATION & REGLEMENTATION
- Arrêté du 26 avril 2024 relatif aux frais de gestion des commissions paritaires interprofessionnelles régionales pour la mise en œuvre du projet de reconversion professionnelle mentionné au 4° du I de l'article L. 4163-7 du Code du travail et du projet de transition professionnelle mentionné au troisième alinéa de l'article L. 6323-17-1 du Code du travail
- Arrêté du 21 mars 2024 fixant le cahier des charges de l'expérimentation d'actions de prévention collective à destination des salariés d'entreprises de travail temporaire
- Décret n° 2024-394 du 29 avril 2024 relatif à la participation obligatoire au financement des formations éligibles au compte personnel de formation
- Décret n° 2024-375 du 23 avril 2024 modifiant le décret n° 2023-1146 du 6 décembre 2023 déterminant les modalités de mise en œuvre de l'expérimentation prévue par l'article 36 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la Sécurité sociale pour 2023
- Décret n° 2024-369 du 22 avril 2024 relatif au congé de paternité des non-salariés agricoles prévu à l'article L. 732-12-1 du code rural et de la pêche maritime
- Loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole
JURISPRUDENCE
- Cass. soc., n° 22-20.539 du 24 avril 2024 Le forfait-jours applicable aux avocats salariés est invalidé par la Cour de cassation en raison de l'insuffisance des mesures liées au suivi de la charge de travail
- Cass. 2ème civ., n° 22-16.197 du 25 avril 2024 L'action de l'employeur en inopposabilité de la reconnaissance d'un AT n'interrompt pas le délai de 2 ans pour faire reconnaître une faute inexcusable
- Cass. soc., n° 22-19.401 du 24 avril 2024 Lorsqu'un salarié conteste son licenciement pour inaptitude dans le délai imparti, il peut alors invoquer le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité à l'origine de son inaptitude peu important la date de ce manquement
